Luis Bunuel  Un Chien Andalou  ESP 1928 (  Mais Qu’est ce...... ? ? )  

« L’amour, reconnu comme un besoin irrésistible de l'être, ne saurait revêtir que la forme de la passion, envahissante et totale, et son intrusion dans une vie prend toujours l'aspect du coup de force ».

André Breton Dans L'Amour fou (1937),  

 

 

 

 

Premier film d’art expérimental, qui m’a été donné de voir. Il va sans dire qu’a la première vision, genre le môme que j’étais, y était réticent. Vas-y un film en noir et  blanc…. Qui plus est… Muet !!? Y a pas moyen que je le vois. Avant de sortir de la salle, j’aperçois du coin de l’œil ( Ouarf !! ) La scène avec un grand S. Eh ben… a gerber. Moi, les effets spéciaux j’connaissait point. A 12  ans, une fille qui se fait crever l’œil, c’est une fille qui se fait crever l’œil ( naïf ?, je l’est toujours été, et tout autant aujourd’hui. Mais la naïveté est une force pour se connecter aux œuvres d’art  !! ) Donc, le mec l’y pas bien. Plus tard en Première une deuxième occasion m’est donner de le revoir. Il va s’en dire que cette fois ci, j’applaudis. Un manifeste du surréalisme, surréaliste puisque étiqueté comme tel par notre ami Breton mais plus problématique pour les deux gus : Dali et Bunuel. C’est un pur délire espagnol, une ode à l’amour fou  ( disparu depuis… Quelqu’un ne l’aurait pas vu par hasard ? ) La partition musicale est choisie avec génie : Tristan et Iseult de Wagner et autre tango. Film expérimental à l’époque, film commercial aujourd’hui ( quelqu’un à vu Being Malkowitch ? )  

 

Luis Bunuel  L’Age D’Or FRA 1930 (  manifeste surréaliste contre Tout )

Là on touche à l’intouchable. Impossible de détruire ce film en ma présence. Un des films de références pour les billie Joe de la bande à Bob Zi Monty Python et leur Vie De Bryan. A la folie de la réalisation du Chien, Bunuel ajoute un High Kick dans la gueule de Dali, ce nazi. Et moi, j’arrive juste à la Rochelle après un voyage plutôt enfumé et totalement crevant. Le reste de la semaine est entré dans la légende…..  

 

Georges Méliès Le Voyage Dans La Lune FRA 1902 ( Lucas, va te rhabiller )

Souvenir, souvenir…. Tendre enfance, passé tout seul dans les champs et dans les salles obscures ( et plus souvent celles ou l’on trouvait une TV ). Le temps ou rien n’était important, et ou tout m’émerveillait, même un simple orvet. A cette époque je découvre quasiment en même temps, mais dans l’ordre Le Voyage Dans La Lune de Méliès et la trilogie Star Wars. Le premier au cinéma, le deuxième à la TV. Et bien sur Lucas, n’en sortira pas indemne. Si le Méliès m’a marqué toute ma vie ( au point de taper un petit scandale quand mon prof de ciné proclame haut et fort que Metropolis est le premier film de science fiction ) la trilogie elle m’a toujours laissé de marbre. Tout au plus si je me souviens d’un ciel étoilé. Après une bonne dizaine de vision, bien sur j’ai retenu beaucoup plus de chose jusqu'à avoir des petites figurines qui se cassent facilement mais dont je ne suis pas si sur que c’est moi qui les avais commandés… Si ? Ah Bon OK autant pour moi.

 

 

 

Terry Gilliam Brazil GB 1985 ( avant Dark City, Gilliam prônait le pouvoir de l’imagination. Problème : son film est ultra pessimiste. Encore un film contre Reagan )  

 

 

 

" Quand on lutte contre des monstres, il faut prendre garde de ne  pas devenir monstre soi même. Si tu plonges longuement ton regard  dans l'abîme, l'abîme finit par ancrer son regard en toi. "

cela aurait put être Lovecraft, mais c'est encore Friedrich Nietzsche  

En classe de quatrième ( ou cinquième chai plus ? ), Mon premier acte de cinéphile et mon premier acte politique. La prof faisant choisir un film à notre chère classe. Quel film aurait-on bien aimés voir ? Brazil ou la lessive X ( un obscur film donc ). Vu que j’avais vu ce putain d’film la veille ( si je me souviens bien ) sur Fr3 ( Et oui, ça fait longtemps, le temps ou il passait Twin Peaks sur la 5 ) j’ai exprimé ma vive appétence pour reprendre la vision de ce film, auquel j’avais pas tout saisi. D’ordinaire plutôt réservé, voir totalement timide à la limite de l’autisme ( toujours mon besoin de l’exagération et du spectacle ), mes camarades, surpris, se sont dit que pourquoi pas ( d’autant plus que le film obscur était vraiment obscur ). Et donc, nous voilà partie en salle de « cinéma » visionner une cassette qui ne devait pas être projeter en public ( c’est marquer au début du film ). Voilà, voilà le film commence et c’est parti pour un bon délire.

C’est le film qui a dévoilé l’aspect « autre » de ma personnalité à l’ensemble de mes collègues. Cet aspect « autre » que n’avait pas la plupart de mes condisciples qui, bizarrement, sont tous ranger aujourd’hui, lorsque moi je continue à flâner et à emmerder la société ( qui me le rend bien, mais bon… J’assume ).  Depuis, j’ai rencontré d’autres personnes, à l’aspect autre, ce qui fait que cet aspect, est en fait tout à fait normal. Brazil est une œuvre d’art, qu’il est quasiment impossible de rejeter, ou alors on s’oblige à l’ennuie infinie de la vie morne et humiliante.

Le titre du film, tout d’abord, si énigmatique, a en fait été choisi par Sidney Sheinberg, alors directeur de la Universal Studios. En effet, les premiers scénarios portaient comme titre « The ministery of torture » ( ça c’est bien, vendeur et fédérateur à la fois, j’aime bien… N° 1 au box office pendant trois semaine ), « Brazil » ou encore « How I learned to live with the system » ( Un peu trop situationniste là ) Plus tard, Gilliam appelait même son futur film « 1984 ½ » sans doute par admiration pour Fellini.

C’est un des derniers films chef d’œuvre absolu du cinéma américain. Même Batman Returns est largement redevable à Brazil tout comme Fight Club. C’est un film incontournable pour son architecture urbaine qui arrive à être totalement différente de Metropolis. Blade Runner, lui, avait échoué à ce niveau là.

C’est aussi une vibrante dénonciation du libéralisme américain qui devenait de plus en plus fasciste, comme le remarque aussi Carpenter avec son They Live. Si la base de Brazil est 1984 de Georges Orwell qui dénonçait aussi bien le nazisme que le stalinisme, Terry Gilliam montre malheureusement que le système dénoncer par Orwell et plus « artistiquement » par Kafka dans son œuvre et principalement lors de son Château, est en train de refaire doucement surface au pays de la liberté ( Y a même une statue qui prévient, lorsqu’on débarque là bas ). Le rêve et l’imagination n’ont plus de droit de citez dans Brazil, Sam Lowry en fera la dure expérience. L’ordre règne, représenter par le MOI : le ministère de l’information. Il dirige l’état, l’économie, la police et l’armée. Le peuple est donc lui aussi sous contrôle. L’ordre ira même jusqu'à contrôler la violence : La violence est ici banalisée. Souvenez-vous de ce passage savoureux, quand un homme, embarrassé par un attentat qui vient de se produire dans son restaurant, dresse un paravent entre les cadavres et les vivants pour que ceux-ci terminent tranquillement leur repas. Le comportement de certaines mairies françaises à l'égard des exclus ressemble à s'y méprendre à celui de cet homme-là. 

Ne nous méprenons pas, le MOI n'est pas le gouvernement dans Brazil. Cependant, il est l'outil qui a pris le pas sur un incorrigible apprenti-sorcier, l'homme. Les vrais dirigeants ne sont que des pantins impotents victimes eux-même du système (sans s'en rendre compte) et pourtant loin des réalités des citoyens. L'un d'eux, lors d'un communiqué de presse, explique à quel point la montée du terrorisme est un point de détail. Tout comme They Live Brazil dénonce un monde ou l’argent est roi, ainsi, Sam rencontre une petite fille, et lui demande ce qu'elle souhaiterai pour noël, et celle-ci lui répond, sans réfléchir»: ma propre carte de crédit".  Gilliam semble pourtant s'être appliqué à ne pas polluer Brazil d'idées politiques, tout comme Fincher et son dernier Fight Club. De notre point de vu, ce constat n'est pas pleinement positif. Malgré toute la bonne volonté du monde, l'individu ne peux pas modifier la société, il ne peut que la subir, ou la fuir. Sam choisi le rêve, mais d'autres luttent eux aussi. La musique de Brazil qui résonne dans les rues est une espèce d'encouragement à l'évasion, comme un acte de résistance, ou une réminiscence d'un passé oublié. La folie, quant à elle, peut aussi être issue.

Néanmoins, il faut dire que Brazil est un film comique. Excessivement drôle d'humour noir satirique. La société décrite est aussi excessive dans le ridicule que dans sa bassesse. Cependant, c'est un film vicieux, car sous son aspect désopilant se cache un film noir, pessimiste. Film comique, oui, mais à condition d'encaisser, comme pour toute caricature. Car ce film est une caricature, une caricature du monde moderne, ou de ce qu'il peut devenir. En dehors de tout ce qu'on peut trouver d'autres comme thèmes dans ce film, Brazil est une dénonciation de l'hégémonie de la bureaucratie. Il montre un futur possible dans lequel certains défauts du monde d'aujourd'hui ont été poussés à l'extrême. Tout ça est bien sûr placé dans un décor adéquat: les espaces verts ont disparu, la ville est un labyrinthe de couloirs et de ruelles polluées sans trottoirs, les autoroutes traversent les quartiers avec leurs caravanes de poids lourds gigantesques, les machines sont toutes des automates déglingués...

Il n'y a plus aucune communication entre les individus: lorsque l'on téléphone au réparateur de climatisation, on tombe sur le répondeur; le métro et l'ascenseur sont automatiques et coincent leurs clients dans les portes ou entre les étages. Lorsque c'est un homme que l'on rencontre, ce n'est pas mieux, on en reste un dialogue de sourd. Dans ce monde infâme, où l'on retrouve les caricatures des travers de la société d'aujourd'hui, que reste-t-il à l'individu comme échappatoire? Si l'on écoute les différents personnages, la poursuite du bonheur est l'ascension sociale et professionnelle: Toujours monter sans hésiter à marcher sur les autres, pour avoir un bureau plus grand, dans un service plus élevé, etc. La vie c'est ça, avec la télévision ringarde, les grands magasins et les restaurants chics où on paie plus pour le nom des plats que pour leur contenu peu ragoûtant. Brazil, c’est donc un Fight Club avant l’heure.

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